Si le protocole instituant la Cour africaine des droits de lhomme et des peuples a été adopté à Ouagadougou le 9 juin 1998, il fallut cependant attendre le 2 juillet 2006 pour que cette nouvelle juridiction soit officiellement installée à Arusha (Tanzanie). Sinscrivant dans la lignée des cours européenne et interaméricaine des droits de lhomme, la Cour africaine des droits de lhomme et des peuples nen présente pas moins certaines spécificités.
Après quelques années doisiveté à ses débuts, la Cour sest progressivement retrouvée à faire face à un afflux de plaintes émanant dindividus dans le courant des années 2010. Depuis cette date, elle peut pleinement remplir son office. La Cour contribue de manière décisive à la protection des droits de lhomme à léchelle du continent africain, en statuant sur de nombreuses plaintes dont certaines ont des implications politiques et sociales très fortes. Elle est en outre parvenue, à travers les multiples décisions rendues dans lexercice de sa compétence contentieuse et de sa compétence consultative, à édifier une véritable jurisprudence.
En dépit de ces avancées significatives, la Cour africaine des droits de lhomme et des peuples est aujourdhui confrontée à de multiples défis. Elle doit, en premier lieu, trouver sa place sur le continent africain face à dautres institutions. Il lui faut saffirmer face à lUnion africaine mais également face aux multiples juridictions sous-régionales dont certaines ont des compétences expresses dans le domaine des droits de lhomme. En deuxième lieu, il lui faut faire face, si ce nest à lhostilité, aux moins aux réticences dun certain nombre dEtats africains. Elle doit les convaincre de ratifier le protocole de Ouagadougou ainsi que de faire une déclaration spéciale acceptant sa compétence condition sine qua non pour que les individus aient accès à son prétoire. Elle doit par ailleurs les convaincre dexécuter les ordonnances et arrêts quelle rend et dont ils sont les destinataires. Enfin, en troisième lieu, la Cour ne doit ni plus ni moins que préserver son existence. En effet, lannée même où le protocole de Ouagadougou est entré en vigueur, les chefs dEtat et de gouvernement de lUnion africaine décidèrent de fusionner la Cour africaine des droits de lhomme et des peuples avec la Cour de justice de lUnion africaine, pour des raisons defficacité et deffectivité. Le protocole réalisant cette fusion a été adopté en 2008 mais nest toujours pas entré en vigueur.
La Cour africaine des droits de lhomme et des peuples est véritablement à la croisée des chemins. Alors quelle est en train de prendre progressivement son envol, de nombreuses menaces pèsent sur elle.
A travers différentes contributions duniversitaires et de praticiens, cet ouvrage a pour objet de revenir sur lactivité de la Cour africaine des droits de lhomme et des peuples et de sinterroger sur son avenir à un moment particulièrement crucial pour elle.